De highway to hell à stairway to heaven, partie 2

« Comment Dieu peut-il justifier le pécheur et avoir une relation avec lui tout en restant juste ? ». C’est la problématique de la lettre de Paul aux romains. En un seul enchainement logique, l’apôtre va résumer la solution à cette question et disons-le franchement, elle est assez dérangeante au premier abord.

Le passage que nous continuons de commenter (nous avons déjà commencé ici) est le début du bouquet final du feu d’artifice commencé au début du chapitre 8 de la lettre aux Romains :

Romains 8.29 Car ceux qu’il a connus d’avance, il les a aussi destinés d’avance à être configurés à l’image de son Fils, pour qu’il soit le premier-né d’une multitude de frères. 30 Et ceux qu’il a destinés d’avance, il les a aussi appelés ; ceux qu’il a appelés, il les a aussi justifiés ; et ceux qu’il a justifiés, il les a aussi glorifiés.

Dès la première lecture de ce passage, on comprend que Dieu est totalement maître de la vie de ceux qui mettent leur foi en Jésus et ce, du premier cri au dernier souffle ou, pour être encore plus fidèle au texte, de la conception à la décomposition. Cette description pourrait, a priori, être vue comme effrayante puisqu’elle semble exclure toute liberté humaine. Dieu serait-il un marionnettiste ?

Prise en charge intégrale : Stairway to heaven

Justifiés : l’aspect juridique

Il fallait que la situation soit bien désespérée pour que Dieu le Fils éternel s’incarne, se dépouille pour vivre parmi nous et enfin s’offre en sacrifice à notre place sur cette infâme croix. Même si la justification est l’avant-dernière marche de l’escalier vers l’état paradisiaque des vv.29-30, il est bon de la citer en premier car c’est l’acte le plus spectaculaire de cette chaîne. Cela nous permet aussi d’aborder un sujet extrêmement important passé sous silence dans le précédent article concernant le caractère dramatique de la dépravité totale : se trouver entre les dents du diable n’est peut-être pas la pire des choses pour un humain non régénéré. Son plus gros problème c’est qu’il est coupé de la présence de Dieu, déclaré coupable à cause de sa rébellion chronique. En effet, le salaire du Péché c’est la mort (la première, physique mais aussi la seconde, éternelle loin de Dieu). Fort heureusement, le Seigneur Jésus a accompli le sacrifice parfait qui résume l’ensemble du système sacrificiel de l’Ancien Testament, nous permettant d’être définitivement justifiés, innocentés par le Dieu parfaitement saint (qui ne tolère aucun péché). Il a donné sa vie en rançon pour nous racheter et nous permettre d’acquérir le statut d’enfants de Dieu. La croix est un acte à la fois juridique et relationnel. 

Reconfigurés : l’aspect intérieur

Comme Saint Augustin, on peut même aller jusqu’à parler d’intimité puisque L’Esprit Saint, troisième personne de la Trinité envoyé par le Père et par Jésus afin de le remplacer, agit à l’intérieur des chrétiens pour les configurer à l’image du Fils, leur frère et chef d’Alliance. En effet, Dieu ne nous sauve pas en Jésus pour finalement nous laisser nous débrouiller tout seuls. Il continue de prendre soin de nous en vivant en nous. L’action de l’Esprit en nous nous permet d’en finir avec notre « ancienne manière de vivre héritée de nos pères » (Éphésiens 4.22) pour devenir la meilleure version de nous-mêmes (actualisation de Éphésiens 4.24). En terme théologique, il nous purifie en nous enlevant notre habit de clochard spirituel (tel le fils perdu de la parabole de Luc 15) pour nous régénérer en nous faisant renaître à une vie nouvelle qui aura pour but de le glorifier comme Jésus l’a fait. Pour cela, un certain nombre de changements vont être nécessaires tant le Péché nous a aliénés, cassés, détraqués. Nous avons besoin d’être remis en état, guéris, restaurés… reconfigurés. C’est le processus de sanctification par lequel Dieu nous transforme pour que notre vie entière le serve. Car désormais plus un seul millimètre carré de notre être ne doit échapper à sa seigneurie puisqu’il « nous a créés pour une vie riche d’oeuvres bonnes qu’il a préparées à l’avance afin que nous les accomplissions. » (Éphésiens 2.10). Et même si certains domaines de notre vie restent plus ou moins partiellement indomptés, nous avons l’assurance qu’ils le seront le jour de l’avènement (=retour pour pleinement régner) du Seigneur, quand nous revêtirons définitivement notre corps pleinement glorifié. En attendant ce jour, Dieu a prévu pour nous une salle de musculation spirituelle appelée « Église » afin que nous grandissions dans nos convictions, notre caractère et notre comportement. Comment ? Grâce aux moyens de grâce que sont la Parole de Dieu, la Prière et les autres membres du Peuple de Dieu (bref, la communion fraternelle mais il me fallait un troisième P !). 

Une adhésion personnelle conduite

Jusqu’ici, nous avons décrit ce qui est communément admis parmi les évangéliques concernant la doctrine du Salut. Cependant l’apôtre va beaucoup plus loin que la communauté juridique (nous sommes justifiés par le moyen de la foi) et la communion vitale (Dieu nous transforme par son Esprit) : il affirme aussi des choses dérangeantes pour les uns, rassurantes pour les autres concernant les termes de l’adhésion personnelle. Quand dans nos deux versets Paul parle de « connaître d’avance » il va bien plus loin que la simple prescience de Dieu concernant les futurs sauvés puisque ceux qui sont connus de lui sont aussi prédestinés à être reconfigurés pour enfin entendre un appel d’une efficacité redoutable aboutissant à la justification. Justification très durable puisqu’elle va jusqu’à la glorification finale. Paul affirme bel et bien que Dieu prend en charge tout le processus de sauvetage de ses enfants, de sorte que même leur volonté doit subir, ou plutôt bénéficier, de son intervention. Ce que la famille d’un toxicomane ne peut pas faire parce qu’elle n’a pas accès à son cerveau et son inconscient, Dieu a la puissance de le faire avec un Pécheur. Dieu ne se contente pas d’un appel externe à se tourner vers lui comme on démontrerait à quelqu’un que l’alcool est mauvais pour sa santé mais il attire à lui ceux qui lui appartiennent et son Esprit les convainc de Péché et de jugement afin qu’ils se tournent vers lui pour recevoir son secours. Autrement dit, Dieu crée l’ensemble des conditions nécessaires (externes et internes) à la conversion de ses enfants qui ne relâcheront jamais la main de Jésus leur Berger jusqu’à son avènement final (Jean 10.28-29). L’escalier vers le paradis est finalement… un Escalator sur lequel on a été poussé et qui conduit inexorablement vers l’étage supérieur ! Cette réalité est très dérangeante car elle remet en cause notre libre-arbitre même si, comme tout bon toxicomane, nous étions plutôt en possession d’un serf-arbitre (= volonté ligotée) ! Quitte à être forcément esclave de quelqu’un, autant l’être d’un Maître qui nous aime et nous veut du bien plutôt que du Péché. Lui seul peut nous garantir une sécurité spirituelle intégrale et éternelle alors réjouissons-nous et marchons à sa suite !

Escalator vers le Ciel : ça met un froid pour ceux qui restent en bas ! 

Le fait que notre Salut ne repose pas sur nos épaules doit avoir pour effet naturel de nous soulager et nous pousser à louer le Seigneur pour la joie de lui appartenir. Mais il faut reconnaître que cette merveilleuse sécurité pour les chrétiens comporte aussi un mauvais côté auquel il faut prendre garde : la bonne nouvelle pour les chrétiens est aussi une fort triste nouvelle pour leurs proches qui n’appartiennent pas au Seigneur. Car il y en a que Dieu n’a pas connu d’avance… on pourrait être tenté d’interroger comme l’interlocuteur virtuel de Paul en Romains 9.19 «  pourquoi alors Dieu fait-il encore des reproches ? Car qui a jamais pu résister à sa volonté ? ». À cette objection, Paul répond que Dieu choisit qui il veut… c’est vrai, mais c’est rude à entendre quand il s’agit d’un proche ! La bonne parade à cette tristesse, c’est de s’encourager au témoignage personnel et à la prière. Car le Salut reste disponible à tous (c’est la vocation externe) et donc à nos proches qui ne connaissent pas (encore) le Seigneur Jésus ! De plus, avouons que nous faisons souvent le minimum syndical dans le témoignage de notre espérance (par crainte de mal nous y prendre ou de choquer), ce qui donne de bonnes excuses à nos proches pour ne pas croire. Or, si notre comportement/témoignage chrétien était plus visible, plus dérangeant et que malgré tout on constatait un certain endurcissement ou même une authentique mauvaise foi de la part de ces incroyants bien-aimé, nous serions moins enclin à leur trouver des excuses car nous verrions avec un peu plus d’acuité leur dépravité.

Conclusion

Romains 8.29-30 pourrait passer pour une mécanique du Salut trop froide. Mais quand on comprend l’ampleur terrifiante de la dépravité, on comprend que c’est un passage extraordinaire qui décrit l’engagement total de Dieu pour nous garantir un Salut qui ne dépend pas de nos forces bien ridicules mais de sa fidélité absolument parfaite. 

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