par David Brown, pasteur et ancien Secrétaire Général des GBU
Dieu a donné des évangélistes à l’Église depuis le jour de la Pentecôte et tout au long des siècles. Cependant nous constatons dès l’époque des apôtres que ce sont des chrétiens ordinaires qui sont au cœur du témoignage rendu au sujet de Jésus. Après le martyre d’Étienne au chapitre 7 des Actes, nous lisons que « le même jour commença une grande persécution contre l’Église de Jérusalem. Tous les croyants, excepté les apôtres, se dispersèrent dans les régions de la Judée et de la Samarie » (Actes 8.1). Tous donc, sauf les apôtres ! Nous lisons ensuite que « ceux qui avaient été dispersés parcouraient le pays en annonçant la bonne nouvelle » (Actes 8, 4). Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Dans Actes 11:19-21, nous voyons que les mêmes personnes ordinaires qui avaient été dispersées après la mort d’Étienne sont allées jusqu’en Phénicie, dans l’île de Chypre et à Antioche et ont même commencé à parler aux non-Juifs pour leur annoncer la bonne nouvelle du Seigneur Jésus. Le récit se termine : « La puissance du Seigneur était avec eux, de sorte qu’un grand nombre de personnes crurent et se convertirent au Seigneur ».
Les missiologues s’accordent pour affirmer que l’Évangile s’est propagé principalement par le témoignage des croyants ordinaires. « Les agents principaux de l’expansion chrétienne ne semblent pas avoir été des professionnels ou des gens y consacrant l’essentiel de leur temps, mais des hommes et des femmes continuant à vivre d’une manière purement séculière et qui parlaient de leur foi à ceux qu’ils rencontraient dans leur vie quotidienne ». C’est l’avis du grand historien du christianisme, Kenneth Latourette.
D’après le livre L’évangélisation du monde de Jacques Blocher et Jacques Blandenier, publié aux Éditions de l’Institut Biblique de Nogent (1998), ceux dont la profession leur permettait d’avoir des contacts nombreux avec leurs concitoyens, en particulier les marchands et les artisans, étaient les principaux propagateurs du christianisme. Nous avons même le témoignage d’un grand ennemi de l’Église au 2e siècle, le philosophe Celse, fier de son rayonnement auprès des gens instruits. Il dénonce la religion chrétienne « qui est prêchée par des ouvriers et des ignorants » et ironise à propos de « ces sottes qui colportent l’Évangile au lavoir » !
Il en va de même aujourd’hui, au 21e siècle, en France. C’est par le biais de chaque chrétien que l’Évangile sera transmis à nos contemporains, en partie par les possibilités techniques qui nous sont offertes, en particulier par internet et par les réseaux sociaux, mais encore plus par les rencontres en face-à-face. Et il y a une bonne raison pour cela. En un mot c’est le besoin de plausibilité. Que veut dire ce mot et pourquoi ce terme est-il important aujourd’hui ? Quelque chose qui est plausible « n’est pas exclu d’office » car cela « entre dans le champ du possible”. Or, dans le contexte culturel français actuel, il y a une telle ignorance de nos contemporains à l’égard du christianisme, pire une certaine méfiance à l’égard d’une intolérance que l’on soupçonne dans la doctrine chrétienne, que l’idée de devenir chrétien ne traverse jamais l’esprit de la plupart de nos concitoyens. D’ailleurs cette méfiance se manifeste dans beaucoup d’autres domaines de la vie.
C’est la raison pour laquelle la transmission de l’Évangile passe par les chrétiens ordinaires. Prenons un cas concret. On veut acheter un nouveau produit électroménager : qu’est-ce que l’on fait ? On cherche sur internet, bien sûr, mais qu’est-ce que l’on cherche ? La description du fabricant ? La pub du magasin ? Non, on cherche d’abord « l’avis des usagers » ! En tant que croyants, nous sommes « usagers » du christianisme. C’est notre rôle de le recommander. Les gens veulent voir la différence que cela fait dans notre vie.
Comment faire alors pour transmettre l’Évangile de façon plausible ? Voici deux pistes bibliques.
D’abord c’est le vécu communautaire des chrétiens : « Si vous avez de l’amour les uns pour les autres, alors tous sauront que vous êtes mes disciples » (Jean 13.35). Lorsque les gens voient une communauté de chrétiens, ils devraient voir des personnes qui s’aiment et qui se soutiennent mutuellement. En fait, il y a très peu d’autres endroits dans la société où l’on trouve des rassemblements aussi mixtes – hommes et femmes, différents groupes d’âge (enfants, jeunes, familles ou personnes âgées), différents tempéraments et classes sociales et des personnes d’origines ethniques différentes. Et sans démontrer autant de mixité, un GBU peut également manifester un véritable amour dans ses relations, les uns envers les autres et envers ceux qui ne sont pas encore chrétiens. Paul a prié dans ce sens pour les Thessaloniciens : « Que le Seigneur fasse croître de plus en plus l’amour que vous avez les uns pour les autres et envers tous les humains » (1 Thessaloniciens 3:12).
La deuxième piste est davantage individuelle. « Conduisez-vous avec sagesse envers les personnes qui n’appartiennent pas au Christ, en saisissant toutes les occasions qui se présentent à vous. Que vos paroles soient toujours agréables et pertinentes ; sachez comment répondre à chacun de la bonne manière » (Colossiens 4.5-6). En résumé le témoignage passe par notre style de vie et notre audace à saisir toutes les occasions pour faire du bien et de parler de Jésus dans notre entourage. Mais il faut être pertinent et savoir comment répondre à leurs questions. Après la plausibilité vient la crédibilité. J’ai été horrifié de lire un des chiffres dans un sondage publié par le CNEF en novembre 2021 portant sur le chrétien et son travail. 85% des personnes interrogées ont déclaré qu’ils ne savaient pas quoi dire en tant que chrétiens quand leurs collègues parlaient de sujets d’actualité au boulot. C’est aux Églises (au moment du rassemblement hebdomadaire, à mon avis) de former les chrétiens dans ce sens. Mais c’est aussi l’une des tâches des GBU. Soyons donc plausibles et crédibles !
(Les références bibliques sont tirées de la Nouvelle Bible en français courant)