Éthique en image (4) : Et le Nouveau Testament dans tout ça ?

C’est le dernier article de la série sur l’éthique de l’Ancien Testament. Mais avant de voir où se situe l’Église à l’intérieur d’un schéma qui commence à être bien chargé, nous allons faire un petit récapitulatif.

Dans le premier article, nous avons démontré que les trois piliers, les trois principaux paramètres de l’éthique du peuple de l’Ancienne Alliance sont Dieu, Israël et le pays. Cela donne trois domaines, trois angles qui définissent la vie du peuple de l’Ancienne Alliance :

 

Dans le second article, Nous avons vu comment ce cadre éthique de l’Ancien Testament répondait bien à la problématique d’un monde (terre et habitants) déchu. C’est l’interprétation paradigmatique (sur un même modèle) :

 

Dans le troisième article, nous avons vu que le peuple et son pays avaient comme fonction théologique d’être le prototype, ou le signe d’une réalité future littéralement parfaite. C’est l’interprétation eschatologique (qui concerne la fin des temps) :

 

Maintenant, où placeriez-vous l’Église dans tout ça ? Elle évolue  toujours à l’intérieur d’un monde déchu, elle ne vit pas encore sur la nouvelle terre mais goûte tout de même une Nouvelle Alliance. Sa position est donc logique, c’est l’interprétation typologique :

 

Dans le Nouveau Testament le langage de la bénédiction, de la sainteté, de la promesse, du don, de l’héritage, et ainsi de suite n’est jamais appliqué aux territoires habités par le peuple juif. Cela s’explique en partie par la propagation du christianisme hors des frontières d’Israël, dans le monde entier et au-delà. Mais cela s’explique aussi et surtout par le transfert de la sainteté du pays (et d’ailleurs de tous ses autres attributs) au Christ lui-même. Le christianisme a fondamentalement substitué la sainteté de la personne à la sainteté du lieu. Il a « christologisé » la Terre Sainte. Jésus, lorsqu’il promet d’être présent partout où son peuple se rassemble, universalise effectivement la promesse vétéro-testamentaire de la présence de Dieu au milieu de son peuple, dans son pays, car le peuple de Jésus vit désormais en tout lieu.

 

Qu’est-il donc advenu du pays dans le Nouveau Testament ?

Ce que le pays signifiait pour la relation d’Israël avec Dieu est typique de certains aspects de la relation du chrétien avec Dieu en Christ. Pour l’israélite, le pays était le don de Dieu, le lieu où il vivait avec Dieu, le lieu d’un certain style de vie moral et spirituel dans la présence de Dieu. En résumé, pour les israélites le pays impliquait la sécurité, l’appartenance, la bénédiction, le partage et la responsabilité. Par leur union au Messie, des personnes de toutes nations ont part au privilège et aux responsabilités du peuple de Dieu qui, dans l’Ancien Testament, étaient liés à la vie dans le pays parce que le Christ lui-même prend le relais du pays. Être en Christ, tout comme être dans le pays, implique d’abord un statut et un type de relation octroyés par Dieu ; deuxièmement, une situation sûre d’appartenance à la famille de Dieu ; troisièmement, un engagement à vivre dignement en remplissant ses responsabilités pratiques envers ceux qui ont part à cette même relation. Telle est l’interprétation typologique du pays d’Israël. Elle consiste tout simplement à rattacher le pays à la personne et à l’œuvre du Messie et, par Lui, à la communauté de ceux qui sont en Christ, l’Israël messianique (c’est à dire l’Eglise).

 

Qu’est-il advenu de la dimension socio-économique du pays qui tenait une si grande place dans l’Ancien Testament ?

Elle réapparaît dans le domaine du partage communautaire et des responsabilités très concrètes des croyants les uns envers les autres, qui marquent la Nouvelle Alliance comme l’Ancienne Alliance. L’unité de ceux qui croient en Jésus-Christ et leur expérience commune du Christ par l’Esprit ne se réduisent pas à un concept abstrait ou “spirituel”. Au contraire, elles ont d’importantes applications pratiques dans le domaine social et économique. Ces deux domaines forment deux composantes de la conception et de la pratique néotestamentaire de la “communion fraternelle”. Le pays et la communion sont liés aux thèmes de la filiation, de l’héritage et de la promesse. Ils sont, par conséquent, une preuve de la relation authentique avec Dieu que connaît le membre de la communauté rachetée.

 

Le “déjà” et le “pas encore”

Lorsqu’on aborde la théologie vétéro-testamentaire du pays sous l’angle de la promesse qu’il représente, on s’aperçoit que cette promesse, comme toutes les promesses de l’Ancien Testament, s’accomplit en la venue de Jésus de Nazareth, le Messie. Le Nouveau Testament, ne nous laisse pas d’autres choix que d’établir ce lien direct. Mais ce motif de la promesse et de l’accomplissement, dans son rapport au pays, se divise en deux parties, à la manière de la double présentation du royaume de Dieu dans le Nouveau Testament. Il y a un un “déjà” et un “pas encore”. Déjà, nous avons accès en Christ et dans la communion fraternelle, au sein de la famille de Dieu, à la réalité du pays que Dieu avait donné à Israël : la bénédiction tangible de notre relation d’alliance, de peuple racheté, avec Dieu et Les uns avec les autres (l’interprétation typologique). Mais reste à venir l’accomplissement ultime du pays promis par Dieu, à savoir la restauration de toute chose dans une nouvelle création, sous de nouveaux cieux, sur une nouvelle terre (interprétation eschatologique).

 

Pour finir et que tout soit bien clair, une petite animation en gif qui retrace notre parcours :

Tous les  schémas ainsi que leur explication sont tirés de l’excellent livre de Christopher Wright L’éthique & l’Ancien Testament.

 

 

 

 

 

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